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MARC

Mur d'inspirations réalisé dans le cadre d'une résidence de recherche sur le projet MARC

Une pièce de Julien Andujar

CRÉATION 2026

Projet en cours

Marc, c’est un catalan joyeux avec des piercings et une crête. Une crête qui raconte le chemin suspendu qui domine le vide. Marc c’est un croquis permanent, des gros traits au marqueur noir, des gribouillis plus fins au stylo Bic et un milliard de ratures et d’annotations autour. C’est une énergie instable, diaboliquement vivante, un étui à guitare farci d’autocollants, un concert de ska-punk à lui tout seul. C'est un corps tatoué, un corps marqué, un corps abîmé, un corps qui a vécu un manque exponentiel et incomblable : celui d’une sœur disparue et celui des produits chimiques qui l’ont sans doute aidé à voir le monde autrement. Marc est inadapté, le mec qui dérange. Un batteur, un béru, un keupon, le gars qui fait la manche là-bas il ressemble à ton frère. Marc a toujours été en marge, au bord, à côté, à la frontière entre la survie et la mort. Marc nous rappelle combien nous ne savons pas quoi faire de nos Marc, y compris du vide de leur départ, aussi prévisible soit-il.

 

Autrement dit, même mort il pose problème… il insiste.

En 2022, j’ai écrit une pièce chorégraphique, théâtrale et musicale qui raconte la disparition mystérieuse de ma sœur aînée Tatiana en 1995 et qui porte son nom. C’est à la fois une fiction autobiographique, une cérémonie joyeuse et une ode à la vie. Elle connaît un succès inattendu et nous la jouons avec le benjamin de la fratrie, Alex, compositeur de la b.o. du spectacle et qui m’accompagne en tournée. Une histoire de famille, en somme. Pendant que nous nous préparions à finaliser cette pièce hommage, Marc est mort. Deux mois avant la première, en plein boum créatif et introspectif, nous accompagnions mon frère dans son dernier voyage, lui qui était toujours en périple intérieur, avec son cœur comme seul baluchon. Son décès fait autant partie de mon histoire intime que de celle de la création. Sa mort est intrinsèquement liée aux hommages publics rendus à Tatiana. Insécable. Et pourtant, mon frère n’apparaît jamais dans la galerie de personnages que j’incarne sur scène. Un autre absent de l’histoire.

Dos nu d'un homme tatouté au cou et au bras, avec écrit de multiples fois "MARC" partout dans son dos, image d'illustration

Pour ce nouveau chapitre de ma saga familiale, je souhaite raconter mes Marc, tous les Marc. Ceux qui le constituent, ceux qui n’en font qu’un, ceux qui se sont soudainement éclipsés alors qu’ils n’avaient que 41 ans et qu’ils n'étaient au fond qu’une bande de vieux ados. Dans ce solo auto-fictionnel, j’aimerais entamer un dialogue avec eux. Je rêve une épopée macabre, drôle et grinçante dans laquelle je ressuscite mes Marc en incarnant toutes les projections que j’ai de lui, aussi bien mort que vivant. Je veux faire de Marc mon Edward aux mains d’argent, mon Frankenstein, mon Rocky Horror, ma création à moi, recoller les morceaux pour voir ce que ça fait.

 

Pour raconter mon frère, je dois mettre en relation la complexité de nos liens et le chaos que suscite l’acte même de faire œuvre de sa mort. En exposant à nouveau une partie de ma vie intime sur scène, je deviendrai peut-être aussi le frère monstrueux, celui qui fait parler les absents avec sa propre voix, celui qui rend hommage aux disparus en se mettant lui-même dans la lumière. Je serai ce monstre, ces monstres, les vivants et les morts-vivants. Je révélerai nos cicatrices. Celles qui réécrivent l’histoire, la recousent et la réinventent. Après avoir tenté de réparer l’histoire de Tatiana en invoquant sa présence en chacun de nous, je me lance à corps perdu dans cette nouvelle quête auto-fictionnelle et réparatrice : parler à Marc. Je rêve un projet poétique, satirique, musical, chorégraphique et théâtral, un tête à tête avec mes Marc, un live d’outre-tombe, un concert de l’au-delà… rien que ça. Marc, la tragédie musicale.

 

Je cherche à vous faire rencontrer mon frère, le frère que j’aurai moi-même aimé rencontrer.

RECHERCHE &
CRÉATION

Première résidence de recherche - avril 2024 // Le Gymnase CDCN à Roubaix

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